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Se débrancher de la machine • Pivot – Pivot Quebec

Dans les grands médias ou encore sur des plateformes comme LinkedIn, je tombe régulièrement sur des textes écrits par des « expert·es » qui appellent les professeur·es à intégrer immédiatement dans les classes les nouvelles technologies pilotées par des intelligences artificielles comme ChatGPT (cet outil permettant de répondre automatiquement à des questions d’examen). Ces discours sont habituellement accompagnés des mêmes phrases clichés sur le fait qu’il est impossible d’arrêter le progrès ou encore que la technologie dépend de ce qu’on en fait ou je ne sais quelle autre ineptie. Même les médias progressistes comme The Atlantic se sont lancés dans l’éloge technophile : je pense notamment à ce récent texte où l’auteur proclamait que la prochaine grande compétence du 21e siècle serait le fait d’apprendre à dialoguer avec les algorithmes. « Votre avenir professionnel pourrait dépendre de votre capacité à parler à l’IA », titrait l’article. Wow, ça fait rêver! Le fossé se creuse entre les discours technophiles en éducation et la pratique éducative réelle au jour le jour, Or, en parallèle à ces discours idéologiques se déroule la vraie pratique éducative, que des professeur·es dévoué·es, pilotant des classes surpeuplées, ne cessent de soutenir sans relâche. Lorsque je discute avec des collègues, je remarque d’ailleurs que beaucoup d’enseignant·es sont très sceptiques face à l’arrivée des nouveaux outils algorithmiques dans les classes. L’argument est d’abord quasi juridique : on dit souvent que l’utilisation de ChatGPT pourrait favoriser la montée du plagiat et de la tricherie. Mais l’argument critique pourrait aller beaucoup plus loin, comme l’écrivent si bien Eric Martin et Sébastien Mussi en rappelant toute l’importance de l’industrie capitaliste de l’innovation technique et du capital humain. Dans les classes que j’enseigne, je remarque souvent que les outils techniques sont des gadgets qui ne servent pratiquement à rien au niveau pédagogique (pensons aux tableaux blancs interactifs que l’ancien premier ministre du Québec Jean Charest avait commandés au coût de 240 millions $ en 2011…). Bien au contraire, ces outils sont des sources de distraction pour les étudiant·es qui sont constamment rappelé·es « à l’ordre » par diverses alertes provenant de leurs applications. Faut-il redire que nous consultons notre téléphone plus de 100 fois par jour, que nous recevons plus de 120 notifications quotidiennes? Tout cela sans parler des alertes sur nos chaînes Slack, sur nos multiples applications, sur nos deux, parfois trois ou quatre boites courriel? Comment se concentrer dans un tel environnement où nous sommes incessamment saturé·es d’informations, pour la plupart inutiles? Comment ne pas devenir anxieux·ses devant ce déluge d’informations? « Quand le monde s’adresse à nous, nous devons apprendre à nous débrancher », écrivent Martin et Mussi. Et c’est là que réside le vrai défi : apprendre à se débrancher de la machine. Source: https://pivotquebec.ca/se-debrancher-de-la-machine/

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